Avant que le règlement ne vienne contraindre les équipes à rouler avec des voitures fermées en LMP2, et à choisir entre une poignée de constructeurs, la catégorie était animée par une fabuleuse diversité. Lola, Norma, Oreca ou Zytek ont marqué la période 2010-2016. Ce sont aussi les Pescarolo, devenues Morgan, qui ont brillé et incarne cette période de transition entre Le Mans Series et Championnat du Monde d’Endurance (WEC).

Ascott Collection a le plaisir de proposer à la vente la Morgan LMP2 châssis 01-18, engagée en 2013 en WEC et notamment aux 24 Heures du Mans. Une voiture emmenée par un équipage solide, qui a trusté les podiums et même brillé aux Etats-Unis.

​

De la Pescarolo 01 à la Morgan LMP2

Lors de la manche de Monza, qui lance la saison 2007 des Le Mans Series, les Peugeot 908 diesel constituent, bien entendu, la grande nouveauté ! Le constructeur français est de retour et s’engage en endurance pour la première fois depuis 1993. Mais à quelques box seulement, une autre voiture débute, et possède aussi un ADN français puissant : la Pescarolo 01. Pilote devenu patron d’équipe, Henri Pescarolo a créé sa propre structure et a décidé de devenir constructeur. Engagé jusqu’ici avec des Pescarolo C60, nommées ainsi car le travail de modification des châssis Courage C60 avait été poussé loin, Henri Pescarolo lance avec la 01 sa toute première voiture « maison ». Si un air de famille est perceptible avec les C60, c’est que la révolution aérodynamique n’est pas complète. En effet, la Pescarolo 01 LMP1 reprend largement le dessin de la Courage C60, mais le châssis, lui, est entièrement nouveau.

Le développement aérodynamique a été réalisé à la base aérienne militaire française de Brétigny-sur-Orge à l'aide de tests en ligne droite. Sur le plan mécanique, la nouvelle Pescarolo est très similaire à la Courage C60 de 2006, mais équipée du nouveau moteur Judd GV5.

Mais pourquoi Pescarolo a-t-il choisi de construire sa propre voiture plutôt que d'acheter des châssis de Courage LC70 produits à quelques mètres seulement de son bureau dans le Technoparc du Mans ? « Au cours des trois dernières années, nous avons conçu et construit notre propre voiture autour du châssis C60. Nous étions donc prêts à construire notre propre voiture de A à Z, ce qui est beaucoup plus intéressant comme projet ». Maîtrisée de bout en bout, la construction d’une nouvelle voiture suppose tout de même des efforts financiers conséquents.

Les difficultés financières de Pescarolo Sport amènent en 2010 une reprise de l’activité par Jacques Nicolet et ses équipes. Oak Racing reprend la partie engagement en compétition, et Onroak Automotive (qui deviendra Ligier Automotive en 2019) devient la branche constructeur, dans la continuité des travaux d’Henri Pescarolo. C’est ainsi qu’à partir de 2012, Onroak Automotive développe sur la base d’un châssis Pescarolo 01 LMP1 la Morgan LMP2, qui peut accueillir les moteurs Judd HK V8 et Nissan VK 45 V8.

Un aileron de requin, des ouvertures au-dessus des roues, et une nouvelle face avant sont à noter. Partenaire de développement en LM P1 avec Dunlop, l’équipe Oak Racing a réalisé dans son propre bureau d’études des travaux de recherche et de modification sur les suspensions et la carrosserie. Les Pescarolo 01 devenaient des Oak Pescarolo en LM P1 tandis que les châssis répondant aux règles LM P2 sont eux nommés Morgan.

Le succès arrive dès la première saison pour les Morgan en WEC (qui est la saison inaugurale du Championnat du Monde) avec quatre podiums, une pole position et trois meilleurs tours en course.

​

Morgan Nissan Oak Racing LMP2 châssis 01-18

Des débuts en Championnat du Monde

Le châssis Morgan LM P2 #01-18 est assemblé pour la saison 2013. Il est engagé cette année-là de manière exclusive en WEC, avec le n°24. Comme les autres voitures de l’équipe Oak Racing, la LMP2 est propulsée par le moteur Nissan VK45. Elle est chaussée de pneumatiques Dunlop et habillée de la traditionnelle livrée noire et mauve de l’équipe.

A Silverstone, Olivier Pla, Alex Brundle et David Heinemeier Hansson font face à une météo capricieuse tout au long de la course mais terminent 2e. Joli baptême du feu.

A Spa-Francorchamps, nouvelle 2e place. Olivier Pla prend la tête de la catégorie en doublant d’entrée de jeu la Zytek-Nissan n°38 de Jota Racing et l’Oreca-Nissan n°49 de Pecom Racing. Une première place qu’il a conservé jusqu’à son premier arrêt au stand. Mais la sortie de la voiture de sécurité dans les instants suivants piégeait la LMP2, qui perdait 2 minutes sur les leaders, qui profitaient d’un « arrêt gratuit ». La victoire était promise.

Au Mans, les ambitions sont légitimes. Olivier Pla décroche la pole position le jeudi soir en 3’38’’621, et place #01-18 en haut de la feuille de temps des LMP2 ! En course, les Morgan réalisent le doublé, la n°35 de Bertrand Baguette, Martin Plowman et Ricardo Gonzalez devant #01-18.

L’équipe se présente à la manche brésilienne en tête du championnat. Mais la n°24 ne peut faire mieux que 6e en LMP2, résultat qui sera d’ailleurs répété peu après aux 6 Heures des Amériques. La tournée asiatique est bien meilleure, avec une 4e place à Fuji, puis deux 2e places à Shanghai et Bahreïn. Pour cette ultime course, la n°24 termine d’ailleurs au pied du podium du classement général !

La n°24 termine une saison en beauté en étant 2ème du Trophée Endurance FIA pour les Équipes de LMP2, grâce à cinq 2e places sur huit courses. Huit courses sans aucun problème technique.

​

2014 : Le rêve américain

La saison 2014 débute de l’autre côté de l’Atlantique. Profitant de la convergence entre l’American Le Mans Series (ALMS) et le Grand-Am, permettant de voir émerger le United SportsCar Championship, Oak Racing se lance dans un double programme, passant à la fois par le WEC et ce nouveau championnat américain. En USCC, Oak Racing peut se battre pour la victoire au général ! C’est avec le support de 8Star Motorsports, qui stocke le prototype, que l’aventure démarre.

#01-18 est la voiture de ce défi et tout commence à Daytona. Le sujet de l’équivalence entre les DP issues du Grand-Am et les LMP2, venues des séries ACO, bat son plein. Le défi est de taille pour Oak Racing qui n’a jamais roulé aux Etats-Unis, et doit composer avec un manufacturier unique, Continental. La saison sera largement dominée par les DP, en nombre, avec en particulier les équipes Action Express Racing et Wayne Taylor Racing. L’opposition la plus féroce viendra de l’équipe Oak Racing !

La 8e place de Daytona (6e en catégorie) ne traduit pas l’excellente prestation. La Morgan connaît un problème d’alternateur qui lui fait perdre 17 tours, et elle termine à… 17 tours ! L’exploit était donc possible dès la toute première course de la nouvelle série.

Les 12 Heures de Sebring et la manche de Long Beach amènent des 4e places. Dans les rues de Belle-Isle, Gustavo Yacaman et Olivier Pla sont 3e. La Morgan, en déficit de vitesse de pointe en comparaison aux DP, se révèle agile avec son châssis bien plus moderne et vif dans les tracés plus sinueux. A Watkins Glen, Gustavo Yacaman assisté d’Alex Brundle et Ho-Pin Tung terminent 2e après un départ depuis la pole position. Une voiture de sécurité dans les derniers instants permettait à la DP n°90 de Spirit of Daytona Racing de revenir au contact, et de passer le prototype français pourtant solidement en tête. La victoire semblait possible, elle échappait aux tricolores pour un tour. Elle intervenait lors de la manche suivante mi-juillet à Mosport. Gustavo Yacaman et Olivier Pla font briller pour la toute première fois une LMP2 dans le championnat. Le tracé routier vallonné proche de Toronto a permis à la Morgan de moins souffrir de son déficit de puissance face aux DP et leurs blocs Chevrolet. Car toutes les DP ont eu le droit pour 2014 à un « kit » tant sur le plan aérodynamique que mécanique.

La « mission Commando » de Philippe Dumas, Team Principal du Oak Racing, était remplie, comme il le racontant dans Auto Hebdo (n°1983 du 22 octobre 2014). « Nous sommes venus à dix au maximum pour gagner, autrement dit pour laisser une trace. C’est fait. Pourtant, notre planning et notre budget nous faisaient arriver la veille des essais pour réviser la voiture, disputer la course, rester le jour d’après pour faire le point, avant de repartir en France. Tout était chronométré, ce qui veut dire que le moindre contretemps devenait contrariant ».

A noter que la Morgan n’a pas pris part aux manches d’Austin et de Petit Le Mans, Jacques Nicolet préférant engager la nouvelle JS P2.

​

L’exploit humain

Si la voiture n’est plus vue en 2015, elle réapparaît en 2016. Elle est engagée lors d’une manche d’European Le Mans Series (ELMS), ainsi que sur une course de la série VdeV. A chaque fois, on retrouvait au volant Frédéric Sausset. Le pilote quadri-amputé à la suite d’un accident bactériologique en 2012, a entamé dès le début de l’année 2013 le projet fou de participer un jour aux 24 Heures du Mans.

Sa préparation s’est déroulée sur plusieurs saisons, et son engagement à bord de la Morgan LMP2 en fut l’aboutissement. Spécialement adaptée pour qu’il puisse en prendre le volant, la voiture a ainsi disputé une seconde fois Le Mans (après 2013), avec une 38e place finale. Il raconte dans l’annuel des 24 Heures du Mans 2016 le système prévu : « J’ai des palettes qui arrivent au niveau des cuisses et qui sont reliées directement aux pédales d’accélérateurs et de frein. Cela nécessite, bien sûr, une boîte de vitesses automatisée. Ensuite, mon avant-bras est fixé à ce qui joue le rôle de volant via une emboiture de prothèse qui vient se fixer dans une rotule ».

Oak Racing a joué un rôle central dans cette aventure, apportant donc le châssis 02-18. Un temps, le support d’Audi a été évoqué pour la fourniture moteur (comme sur un autre prototype CN utilisé en VdeV) mais c’est bien un Nissan V8 qui a été utilisé.

L’aventure humaine de Frédéric Sausset a été largement documentée dans les médias du monde entier, reprise par des publications de tout premier plan.

​

Une LMP2 très rapide pour courir dans les nouvelles séries historiques et à Le Mans Classic Legend 2026

Cette Morgan Nissan LMP2 constitue le nec plus ultra des LMP2 ouvertes. Ayant un superbe palmarès et ayant été restaurée par son constructeur, il est clair que cette LMP2 a de nombreux atouts pour séduire un compétiteur collectionneur. Elle ouvre en effet l'accès aux plus belles courses historiques de la planète que cela soit aux USA ou en Europe. Avec la belle saison 2026 qui se profile aux vues des programmes de course annoncés par Masters Historic Racing et Peter Auto, cette superbe LMP2 devrait bientôt retrouver les circuits et nous l'espérons retourner au Mans lors du Mans Classic Legends où elle a réalisé une superbe deuxième place!

​

Historique de course

30/03/2013 - Test officiels FIA WEC - Olivier Pla / Alex Brundle - 4e (n°24)
14/04/2013 - 6 Heures de Silverstone - Olivier Pla / David Heinemeier Hansson / Alex Brundle - 8e (n°24)
04/05/2013 - 6 Heures de Spa - Olivier Pla / David Heinemeier Hansson / Alex Brundle - 9e (n°24)
09/06/2013 - Test 24 Heures du Mans - Olivier Pla / David Heinemeier Hansson / Alex Brundle - 10e et 1er LMP2 (n°24)
23/06/2013 - 24 Heures du Mans - Olivier Pla / David Heinemeier Hansson / Alex Brundle - 8e et 2e en LMP2 (n°24)
01/09/2013 - 6 Heures d'Interlagos - Olivier Pla / David Heinemeier Hansson / Alex Brundle - 11e (n°24)
22/09/2013 - 6 Heures d'Austin - Alex Brundle / David Heinemeier Hansson / Olivier Pla - 10e (n°24)
20/10/2013 - 6 Heures de Fuji - Olivier Pla / Alex Brundle / David Heinemeier Hansson - 7e (n°24)
10/11/2013 - 6 Heures de Shanghai - Olivier Pla / Alex Brundle / David Heinemeier Hansson - 6e (n°24)
30/11/2013 - 6 Heures de Bahrain - Olivier Pla / Alex Brundle / David Heinemeier Hansson - 4e (n°24)
05/01/2014 - Test Daytona - Olivier Pla / Roman Rusinov / Gustavo Yacaman / Martin Plowman - 10e (n°42)
26/01/2014 - 24 Heures de Daytona - Olivier Pla / Roman Rusinov / Gustavo Yacaman / Oliver Webb - 8e (n°42)
21/02/2014 - Test Sebring - Gustavo Yacaman / Olivier Pla / Ho-Pin Tung - 2e (n°42)
15/03/2014 - 12 Heures de Sebring - Olivier Pla / Alex Brundle / Gustavo Yacaman - 4e (n°42)
12/04/2014 - Long Beach 100 Minutes - Gustavo Yacaman / Olivier Pla - 4e (n°42)
04/05/2014 - 2 Heures de Laguna Seca - Gustavo Yacaman / Alex Brundle - 19e (n°42)
31/05/2014 - Detroit 100 Minutes - Gustavo Yacaman / Olivier Pla - 3e (n°42)
29/06/2014 - 6 Heures de Watkins Glen - Gustavo Yacaman / Alex Brundle / Ho-Pin Tung - 2e (n°42)
13/07/2014 - Mosport - Gustavo Yacaman / Olivier Pla - Vainqueur (n°42)
25/07/2014 - 2h45 Indianapolis - Gustavo Yacaman / Ho-Pin Tung - 8e (n°42)
10/08/2014 - Road America - Gustavo Yacaman / Olivier Pla - Abandon (n°42)
23/03/2016 - Test ELMS Paul Ricard - Frédéric Sausset / Christophe Tinseau / Jean-Bernard Bouvet - 14e (n°84)
16/04/2016 - 4 Heures de Silverstone - Frédéric Sausset / Christophe Tinseau / Jean-Bernard Bouvet - 31e (n°84)
24/04/2016 - 4 Heures du Mans (VdeV) - Frédéric Sausset / Christophe Tinseau - 15e (n°84)
05/06/2016 - Test 24 Heures du Mans - Frédéric Sausset / Christophe Tinseau / Jean-Bernard Bouvet - 33e (n°84)
19/06/2016 - 24 Heures du Mans - Frédéric Sausset / Christophe Tinseau / Jean-Bernard Bouvet - 38e (n°84)

 

La voiture est présentée avec le numéro de course 26 qu'elle a eu en Masters Endurance Legends au Silverstone Festival en 2023

​

Photo credits for period photos: John Brooks